The Beatles – The White Album (Par Eric)

lundi 6 juillet 2009

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Pourquoi avoir choisi un album de plus de 40 ans ?

Le choix d’un album à chroniquer a été difficile. Comment choisir ? Le coup de cœur du moment ? Un choix branché ? Un album qui nous a marqué, oui mais lequel, il y en a tant… Alors, j’ai opté pour l’aspect chronologique.

Retour dans le temps… Il y a bien longtemps dans une galaxie lointaine, je découvre dans les disques paternels, à l’âge de 10 ans, une compilation des Beatles et c’est le premier choc musical. Bien sur, cette compilation regroupe essentiellement les années 62-65 mais je découvre alors la magie des “Fab Four”.

L’écoute de l’album blanc est venue ultérieurement. Si j’ai choisi celui-ci dans la discographie des gars de Liverpool, c’est parce que j’estime qu’il représente à lui tout seul l’apport énorme des Beatles à la musique rock. Bien sur, “Rubber Soul” constitue déjà un tournant tout comme “Revolver” mais “The White Album” représente, pour moi, la synthèse du groupe. Il est plus rock, plus simple au niveau des arrangements, plus mélodique que “Sgt Pepper”.

Alors, tout le monde ou presque connaît le contexte de sa réalisation : l’ambiance est tendue entre les musiciens au point qu’ils enregistrent chacun de leur côté. Ringo claque la porte pendant les sessions, la présence de Yoko Ono est permanente et agace le reste du groupe, l’ingénieur du son s’en ira également suivant le mouvement initié par Ringo Starr, etc… L’album sera double, il y a donc de la place pour chacun des compositeurs. On y trouve des ballades acoustiques, du rock, des expérimentations, … McCartney excelle comme compositeur touche-à-tout, Lennon va encore plus loin dans l’introspection, Harrison compose ses plus beaux morceaux et, même Starr sera de la partie cette fois !

Des morceaux ? Si le double album s’ouvre sur un “Back in the USSR” un peu fade, clin d’œil simultanément à Chuck Berry (“Back in the USA”) et aux Beach Boys (beaucoup plus concurrents des Beatles à l’époque que ne le furent les Stones), c’est pour mieux apprécier la superbe ballade de Lennon “Dear Prudence” (en picking svp et dédié à la sœur de Mia Farrow qui les accompagnait à Rishikesh, Inde).
Glass Onion” (de Lennon également) est plus anecdotique ainsi que le “Ob-La-Di, Ob-La-Da” de McCartney et le “Honey Pie” (tout droit sorti des impros de Rishikesh), mais “The Continuing Story of Bungalow Bill”, sorte de ballade toute en dérision constitue le tapis idéal pour amener le bijou de l’album : “While My Guitar Gently Weeps”. Composé par Georges Harrison, le titre se base sur les méditations du guitariste sur base du Yi Jing. Il met énormément de temps à être enregistré et le sera définitivement avec l’apport essentiel de la ‘Les Paul’ d’Eric Clapton. Que dire ? Le solo est titanesque et les notes de Clapton font chaque fois mouche et l’interprétation d’Harrison est parfaite en émotion.
Hapiness is a Warm Gun” est intéressant du point de vue du collage musical ainsi que de la polyrythmie mais peut déconcerter par sa structure changeante.

la deuxième face du disque s’ouvre sur la déclaration de Paul “Martha my Dear” et le très introspectif “Im So Tired” de John. Une des richesses du groupe est justement cette éternelle contradiction entre les pièces ‘légères’ de Paul et les moments plus ‘graves’ de John. John, qui crie déjà son amour ici pour Yoko et qui maudit le régime ascétique que lui impose son séjour à Rishikesh (méditation transcendantale). Deuxième bijou : “Blackbird” de Paul, seul à la guitare, une pépite minimaliste dont seul le bassiste a le secret.
Piggies” et son clavecin et “Rocky Raccoon” et son piano honky-tonk passés, nous découvrons le premier titre entièrement composé par Ringo Starr : “Don’t Pass me By”. Personnellement, je le trouve assez moyen voire ennuyeux… Sur les 3 morceaux restant du disque, nous assistons à un renversement des rôles : Paul attaque le rock avec “Why Don’t We Do It in The Road”, John la ballade avec “Julia”, poignante chanson écrite pour sa mère.

Deuxième disque et troisième face (vous suivez ?), les 4 ouvrent avec “Birthday”, très spontané et très R’n’r. “Yer Blues” donne à Lennon l’occasion de s’épandre sur ses états d’âmes, plongé dans le désespoir et atteint de pulsions suicidaires (“In the morning, wanna die, in the evening, wanna die/Le matin, envie de mourir, le soir, envie de mourir”). Paul redonne de la ballade avec “Mother Nature’s Son” et John parle de son amour pour Yoko avec “Everybody's Got Something to Hide Except Me and My Monkey” avant d’attaquer un autre chef d’oeuvre de l’album : “Sexy Sadie”. Déçu par le Maharishi Mahesh Yogi, John compose une de ses plus belles chansons sur un texte où n’apparaît pas le nom du principal intéressé (Maharishi devenant Sexy Sadie) mais dont le texte est très révélateur sur l’état de colère du groupe au moment de leur départ de Rishikesh. Contraste très fort avec la chanson suivante puisque c’est “Helter Skelter”. Morceau à la morbide réputation suite à l’affaire Manson. Beaucoup pensent que c’est le premier morceau de Hard Rock de l’histoire, Paul s’y époumonant avec énergie ! Contraste d’autant plus saisissant avec le “Long, Long, Long”, ballade de Georges très aboutie harmoniquement.

Quatrième face déjà, et on commence par un Blues aux guitares saturées avec un message ouvertement politique signé Lennon, bien entendu : “Revolution”. “Honey Pie”, par Paul, donne dans le ‘Old-fashioned” tel qu’on l’entendra de nouveau plus tard avec Queen (“Seaside rendez-vous ou Good Old-fashioned Lover Boy’), c’est une ballade très riche instrumentalement. Georges, décidément très inspiré, nous compose “Savoy Truffle” en hommage, pour l’anecdote, à la passion du chocolat de son ami Eric Clapton !
Cry baby Cry” est une berceuse qui précède paresseusement le fameux collage de bandes de “Revolution N°9”. Que dire à propos de cela si ce n’est que c’est agaçant de bout en bout et que les expérimentations sonores et l’abstraction musicale dénotent beaucoup en cette fin d’écoute. Il est l’heure de dire bonne nuit avec “Good Night”, John écrit pour son fils, Julian, durement éprouvé par le divorce de ses parents.

Bref, avec cet album, les Beatles clôturent définitivement la période yé-yé mais également la période la plus psychédélique de leur parcours. L’œuvre restera une de leurs meilleures ventes malgré le côté décousu, contradictoire, inégal. Ca passe de la beauté à la prétention en passant par les expérimentations de tout nom, mais c’est du Beatles et la beauté qu’ils nous transmettent fait partie de l’histoire…

Alors, il faut quand même préciser qu'au-delà de l'analyse de l'album, l'écoute a été fastidieuse. En effet, le plaisir de la découverte n'est plus là et l'époque à changé. Le double album blanc a vieilli et semble encore plus inégal qu'avant. Restent les quelques chef d'œuvres qui émaillent le disque... "The White Album" me fait penser à un classique de bibliothèque qu'on a lu plusieurs fois dans sa jeunesse mais qui n'arrive plus à vous dérider aujourd'hui excepté quelques phrases de l'auteur. Il fait partie de votre histoire mais ne fait plus partie du présent...

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